"2012 Etat d'Urgence" : le livre de François Bayrou

Publié le par Nathalie Pagani

2012ETATD'URGENCE Sa lecture en est terminée alors, comme promis, à travers ce compte - rendu, je vous livre mes impressions détaillées :

Dès les premiers paragraphes, on comprend que François Bayrou ne nous entraînera pas dans le catastrophisme que le titre du livre peut laisser supposer. C'est un livre d'espoir, d'espoir lucide, pas un "patchwork de promesses mirobolantes qui tombent en cascade au moment des élections". Un livre de vérité et d'appel à la responsabilité. Les constats sont posés, les mots sont parfois très forts -  guerriers -  le ton est convaincant, oserai - je dire, enthousiaste car oui, il nous exhorte au courage et à nous saisir de nos forces et de nos atouts !

Très vite, François nous livre sa méthode et même son objectif : "dans les jours difficiles, il faut aller à l'essentiel, concentrer les efforts" pour répondre à 2 urgences nationales : produire en France pour reconquérir l'emploi et rééquilibrer nos comptes ET rendre à la France la meilleure éducation au monde. Produire et Instruire. Car selon lui, "c'est de là que tout recommencera".

 La dette et les déficits, largement au coeur de sa campagne de 2007,  sont aujourd'hui l'objet de toutes les préoccupations. L'actualité lui donne aujourd'hui (malheureusement) raison. 1700 milliards d'Euros de dettes qui nous obligent à emprunter, chaque jour (oui, chaque jour) 1 milliard d'Euros. Aujourd'hui aux alentours de 3%, ce que nous arrivons à peine à supporter alors que se passera t-il si demain, les prêteurs exigent 5%, 6% ou plus ? D'où l'urgence de retrouver des équilibres financiers et dans le même temps de créer des ressources nouvelles.

Il est un paramètre significatif sur la spirale hémorragique de la France : le déficit de notre commerce extérieur depuis 2003 : nous sommes passés de 0.3 milliard à 51 milliards en 2010 et sûrement 80 milliards pour 2011 ! Bref, nous achetons largement plus que nous vendons. François Bayrou s'appuie sur l'exemple allemand, parent malade il y a encore 7 ans, doté du même type de modèle social, aux salaires supérieurs aux nôtres, avec la même monnaie, et qui a réussi, en 5 ans, a retrouvé la prospérité.

Il propose donc la mise en place d'un agenda 2020, appel à la mobilisation générale de tout un pays. Avec la création d'un Conseil de la production réunissant  petits et grands acteurs économiques, pouvoirs publics, financeurs pour définir une stratégie. c'est une reconquête industrielle par l'offre (car le soutien à la demande ne ferait que favoriser un peu plus les produits importés, par la haute technologie, le soutien aux PME. Son argumentation est, bien évidemment, émaillée d'exemples concrets de reconquêtes, de solutions pragmatiques et de bon sens. Il plaide aussi pour une refondation de la confiance sociale entre salariés, entreprises et syndicats. Avec un engagement : pas de baisse des salaires. Associer, par ailleurs, le consommateur par la mise en place d'un label France : transparent, celui - ci informera du degré de production  sur le sol français (tout ou partie, par une entreprise française ou étrangère installée en France...). 

L'équilibre, la justice doivent être au coeur du contrat démocratique avec une nouvelle répartition des charges sociales, une contribution plus juste des plus hauts revenus. Tout comme un plan crédible pour les finances publiques additionnant économies et mobilisant ressources nouvelles.

Puis, François Bayrou s'attaque à son 2e axe : l'urgence éducative. Au travers des lignes qui dépeignent la désastreuse situation de l'Education Nationale (25e place des pays développés), on peut sentir tout  son attachement à la profession d'enseignants, à "l'univers enchanté" qu'est l'école.

Sanctuariser les moyens alloués à l'école est le préalable. L'ojectif premier : la maîtrise des fondamentaux (lire, écrire, compter) avec comme méthode l'utilisation des expériences réussies plutôt que l'application de pédagogies dogmatiques. Le deuxième objectif : protection et autorité de rigueur. François Bayrou ouvre également différentes pistes de réflexion et d'actions : la stabilité et la lisibilité des programmes, l'organisaton du temps scolaire, la "rescolarisation" des élèves en perdition, l'articulation lycée/université comme celle entre école et entreprise, une école des parents... Autant de défis pour la "mise en avant du pays" ! 

 Enfin, François Bayrou  nous appelle à passer d'une société de défiance à une société de confiance, du camp contre camp partisan à une majorité nouvelle, indépendante. Car c'est le projet qui produira sa majorité et non plus l'inverse.

"Quand sonne le tocsin, on laisse de côté les dissensions de moindre importance pour ne garder en tête que les choix essentiels." 

Ce ne sont pas des larmes et du sang que nous donne en perspective François Bayrou mais bien des efforts qui sont nécessaires au redressement de notre pays. C'est surtout une vision, un projet, un chemin qu'il nous offre à travers ce livre. Je retrouve tout ce qui avait fait résonance en moi en 2007 et plus encore, car l'homme a gagné en densité, en maturité et aussi en clarté. Alors que vous soyiez ou pas en "proximité" politique avec cet homme, son livre est un éclairage de notre temps particulièrement perspicace. Les 1ères pages consultables ici et en e-book, version numérique, sur le site de la Fnac

 

Morceaux choisis :

"Les mauvais jours finiront. La France va s'en sortir. Un jour, dans 5 ans, dans 10 ans, notre crise d'aujourd'hui ne sera plus qu'un mauvais souvenir. C'est cet espoir, ou plutôt cette certitude, qui est le sujet de ce livre."

"C'est une guerre que nous avons à livrer, plus de l'ordre de l'asphyxie progressive que du bombardement...Pour gagner une guerre, il faut se concentrer sur l'essentiel."

"C'est le chantier politique le plus impressionnant du siècle. Il ne se résoudra pas par un énième changement de majorité, de président, ni par le passage programmé, obligatoire, de la droite à la gauche... Il faut une majorité du courage, non d'un bord contre l'autre mais une majorité centrale...Ce sont des temps où le courage n'est pas un luxe. Il devient une nécessité. La France dévale un toboggan auquel son modèle de société ne résistera pas. Ni ses allocations, ni nos services publics, ni notre système de santé, ni nos investissements locaux et nationaux."

"Il ne s'agit pas de dirigisme. Il s'agit de remettre un pays dans le sens de la création. De lui rendre l'envie de créer, de le soutenir, de lui faciliter la vie."

"Le protectionnisme est une tentation impossible...Tout autre est le combat de la mondialisation loyale. Le choix de normes exigeantes doit s'appliquer aux producteurs européens mais à tous les produits en vente sur le territoire européen. Que ce soit en matière agricole ou industrielle"

"Les consommateurs, ce sont aussi des travailleurs, des contribuables, des parents, il faut que les Français consommateurs soient le soutien actif des Français producteurs. Il ne s'agit nullement de protectionnisme, il s'agit de transparence. Le labrel "Produit en France" sera ouvert à tous, pourvu qu'il soit produits en France... Label chiffré en pourcentage. Tout le monde sera informé, tout deviendra transparent."

"Jamais depuis 100 ans au moins, l'école ne s'est sentie à ce point incomprise et rejetée... Le plus dur à constater, c'est cet épuisement de la révolte."

"Tous les enfants peuvent apprendre à lire. Et à écrire, et à compter. Que c'est un droit pour eux, un devoir pour nous."

" Marre qu'il faille être à la fois Tarzan et Socrate pour faire cours. Aucun prétexte à ce scandale quotidien. Tout enseignant doit être respecté dans sa classe. Et ce qui doit le protéger, ce n'est ni un surveillant, un policier mais l'Education Nationale toute entière et le prestige rendu à sa mission."

"Les 2 coalitions de gouvernement traditionnel (gauche et droite) n'ont pas la force suffisante pour assumer des décisions courageuses. Elles sont profondément divisées en leur sein. Elles sont trop liées à des intérêts catégoriels. Et leur face à face, qui dure depuis des décennies, les empêche de faire les gestes de compréhension indispensables au redressement... Elles sont prisonnières d'habitudes de pensées, de tocs et tics, qui les coupent de la moitié du pays qui n'est pas la leur."

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